vendredi 25 mai 2012

La résistance thérapeutique

Lorsqu’une personne consulte pour une souffrance d’ordre psycho-affective, la première étape du processus thérapeutique idéal consiste à déterminer avec précision le type de problématique et son étendu.

La seconde étape est celle durant laquelle le thérapeute tente avec tous les moyens dont il dispose de donner assez de détachement à la personne qui le consulte afin qu’elle voit par elle-même son erreur comportementale. La souffrance étant la route opposée au plaisir et à la satisfaction.

Pour le patient qui le vit cela revient symboliquement à accepter de changer d’habits afin de changer de rôle. Comme nous l’avons vu dans les précédents articles, cette étape consiste à revisiter toutes les stratégies et les rituels comportementaux dont le patient se revêt dans ses échanges sociaux.

Dans la plupart des séances, cette étape se déroule très bien car le patient entrevoit la possibilité qu’il a de mieux vivre et ressent du désir pour ce plaisir dont il s’est privé jusque-là.

Alors qu’il parait logique que la personne mette tout cela en pratique facilement dans sa vie quotidienne, il apparait souvent que la personne revienne déçue de sa propre incapacité. Alors que se passe-t-il ?



Le carcan invisible


Nos différentes stratégies et rituels comportementaux routiniers sont un peu comme un carcan duquel on ne sort pas si facilement. Ils sont rassurants de par leur simplicité de mise en œuvre et constitue « les programmes de fonctionnement par défaut » de notre système nerveux.
Changer de comportement c’est sortir de l’autoroute pour emprunter, à pieds, un sentier que l’on doit tailler à coups de machette ! Le patient en sortant du cabinet fait face à son environnement qui n’a pas changé à son image mais au contraire lui impose sa pression. Dans certains cas malheureusement la personne craque et renonce à changer pour reprendre ses vieux schémas. Il va s’en dire que dans ce cas de figure, l’individu en plus de retomber dans sa problématique s’en veut de ne pas être parvenu à changer. Une spirale négative s’installe et empire la problématique.
Pour réussir à changer la personne doit non seulement modifier ses comportements mais également intervenir dans sa perception de la vie en tant que concept global.

Cela implique une remise en question de la définition qu’elle pose sur les choses et les gens. Ce travail est profondément troublant et quelque part désagréable dans le sens où toutes les valeurs sont profondément remises en question.

Par contre, pour la personne courageuse qui ose s’autoriser à le faire peut enfin découvrir qu’il a la réponse à chaque question. C’est bien là le but de la thérapie : rendre autonome la personne afin qu’elle décide et mette en place une meilleur façon de vivre. Pour le faire l’individu doit affronter le fait de remettre en question ses vérités qui constitue les valeurs des groupes sociaux auxquels il appartient. Cette étape implique d’accepter de se nourrir différemment, de se tourner vers d’autres sources au prix certaines fois de faire un 180° par rapport aux anciennes valeurs.



Abandonner sa vieille carapace


 Depuis l’enfance, chacun développe une « persona ». C’est-à-dire la part de la personnalité qui organise le rapport de l'individu à la société, la façon dont chacun doit plus ou moins se couler dans un personnage socialement prédéfini afin de tenir son rôle social. Cette carapace est essentielle et a pour but, entre autres, de protéger l’être intérieur. Le développement de l’un et l’autre est lié et interdépendant. Plus l’être intérieur est fragile plus il cherchera à développer une carapace apparemment forte et solide pour se protéger. Hors le Moi, la personnalité intérieure, peut s’égarer en finissant par s’identifier à celui qu'il est aux yeux des autres et à ne plus savoir qui il est réellement.
En cas de choc émotionnel, la carapace est mis à mal voir cède totalement. Lors du processus thérapeutique la personne sort de ses rôles sociaux habituels étant donné qu’elle ne joue pas de jeu avec son thérapeute.

Cependant bien qu’elle puisse facilement comprendre ce qui lui faut changer dans ses comportements de la vie quotidienne en cabinet, en sortant elle se sent soudain toute nue sans carapace et il arrive souvent qu’elle enfile l’ancienne à défaut de mieux.

Ce que j’appelle « résistance thérapeutique » est justement ce phénomène de retour en arrière du patient.



Revêtir son habit de lumière


Pour éviter cela, la personne qui effectue un travail intérieur peut éviter ce désagrément en :

·         Soignant son être intérieur qu’il apprend à connaitre lors du processus thérapeutique.

·         Fixant des objectifs de vie vrais, bons pour lui. Ses objectifs idéaux devront lui servir à ce qu’il se donne un cap de vie précis.

·         Revêtant une carapace meilleure que la première : un habit de lumière…

 Ce que j’entends par « habit de lumière » est la constitution d’un masque social respectueux de ce qu’il est vraiment : une protection de l’être intérieur. Mais cette fois-ci, la personne peut en ériger une respectueuse de sa vraie nature intérieure. C’est dans la lumière de cette connaissance qu’elle peut revêtir un costume social qui valorise sa personnalité profonde et lui permet de l’exprimer en toute sécurité. En effectuant ce travail, la personne découvre la capacité qu’elle a de s’adapter à tout et tout le temps…à condition qu’elle se donne les moyens et les droits de changer, d’évoluer, de grandir avec ce que la vie lui donne à apprendre.
Comprendre que la vie en tant que tel est une bande d’information de laquelle chaque être humain perçoit quelque chose de particulier, permet de valider ses propres perceptions et d’en tenir compte dans le cadre d’une réflexion intérieure calme au lieu d’une réaction automatique.



Conclusion


 Tout comme nos corps physiques ont besoin de vêtements afin de se protéger des extrêmes climatiques, nos cœurs et nos esprits s’habillent d’une persona afin de faire face aux rigueurs des climats psycho-affectifs de la société.
Lors d’un processus thérapeutique, la personne découvre les composantes de sa personnalité que sont son être intérieur et sa persona. Et c’est bien là le point très positif de la thérapie : la découverte de la personne par son propre travail de prise de conscience.

A condition d’être bien organiser, ce travail permet à chacun de restructurer sa persona afin qu’elle devienne l’outil d’expression de la nature intérieure de l’être.

La pathologie peut être vue comme un temps que l’être se donne à lui-même afin de redéfinir sa route. Pour se faire rien de tel qu’un plongeon dans les racines de l’être intérieur afin d’en prendre soin comme il convient et de se relever plus fort qu’avant la chute.




                                                                                     Jean-Christian Balmat

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