lundi 7 novembre 2011

Le syndrome de stress post-traumatique (2ème partie)

Système d’activation ou d’inhibition de l’action


Dans le premier article, nous avons découvert les trois choix de l’être humain devant le danger : attaquer, fuir ou rester immobile.
Les SSPT sont surtout dus au fait que la personne étant en état d’inhibition ne choisit plus du tout sa vie mais la subit. Pendant tout le trauma, la victime a subit la volonté de son bourreau… sans rien pouvoir faire.
Pourquoi ? Comment est-ce qu’un être humain peut se retrouver dans cette situation ? Pour cela il faut comprendre le fonctionnement de l’être humain en situation normale.



Programmé à rechercher le plaisir



L’être humain est programmé à reproduire des comportements qui, dans son histoire ou dans celle de son espèce, ont procuré du plaisir, en entretenant sa vie (homéostasie) et en la faisant évoluer.
Ce qui satisfait une pulsion intérieure pleinement génère du plaisir. La satisfaction correspond à la cessation du manque intérieur ayant généré la pulsion. Le plaisir est la preuve sensorielle que le manque a cessé et que le corps va bien. La douleur est évidement l’inverse et conserve la préservation de l’intégrité du corps : en retirant par réflexe sa main d’une plaque chaude par action réflexe instinctive, nous sauvons notre main, sans y réfléchir consciemment. Ces deux notions ont présidé à la spécialisation de trois systèmes nerveux liés aux comportements : l’un est à la récompense (MFB), l’autre à la punition (PVS) et le dernier à l’inhibition (SIA).
Le cycle pulsion – action – satisfaction, géré par le MFB et la fuite ou la lutte efficace, permettant à l’organisme de préserver son homéostasie dans l’action, composent à eux deux le système activateur de l’action (SAA)
Le plaisir est le moyen développé au cours de l’évolution de notre espèce, pour nous inciter à manger, à trouver un partenaire sexuel, à se protéger du froid, etc.



La récompense et la punition


Deux systèmes se sont donc développés dans le cerveau pour traiter la récompense et la punition.
1.      Le « medial forebrain bundle » (MFB) en anglais qui est le circuit de récompense
2.      Le « periventricular system (PVS) », qui est le circuit de punition, qui active la fuite ou la lutte
Ces deux systèmes ont pour but de préserver l’homéostasie par l’action et forment ensemble le système activateur de l’action (SAA).
Le S.A.A. s’oppose au système inhibiteur de l’action (SIA). Ce système s’enclenche en cas d’inefficacité de notre action (qui correspond à un profond sentiment d’impuissance = « je ne peux pas interagir avec mon environnement car ceci est « faux » pour Moi, mais je ne parviens pas à agir donc je ne bouge plus, je me prostre, me replie »).
Le S.I.A. a été utile dans l’évolution et de manière très ponctuelle, dans les situations où toute action est susceptible d’empirer la situation. Lorsque l’humain perçoit que la lutte ou la fuite sont impossibles, il se contente de la soumission et l’acceptation (passive et à contrecœur) afin de maintenir autant que faire se peut le statu quo.
Dans notre société moderne où la compétitivité est érigée au rang de dogme, de nombreuses personnes vivent dans l’appréhension de la « punition » : peur du chômage, peur de ne pas avoir la promotion, peur de ne pas pouvoir payer les factures à la fin du mois, peur de dire au chef de vente nos petits résultats, etc. Dans ce genre de cas, la personne n’a plus l’impression d’avoir de choix et sombre dans l’inhibition chronique. De nombreuses conséquences sont à déplorer lors d’un sur fonctionnement du SIA comme entre autres : dépression, maladies psychosomatiques, ulcères d’estomac, hypertension artérielle. A noter également qu’étant donné que le SIA épuise le potentiel de lutte du système immunitaire des pathologies plus graves peuvent se développer ultérieurement.



Centres de la récompense et du plaisir


Les principaux centres cérébraux de la récompense sont localisés le long du MFB (medial forebrain bundle, en anglais). Le faisceau médian du cortex préfrontal en français). Le MFB est composé de plusieurs centres[1] qui participent tous à la réponse comportementale. Ces centres sont interconnectés et innervent l’hypothalamus, l’informant de la situation, plaisante en l’occurrence. L’hypothalamus réagit alors sur les fonctions végétatives (parasympathique dans ce cas) et endocrinien (libérant des hormones liées au plaisir) par l’intermédiaire de l’hypophyse.


Centres de la punition


Les stimulations déplaisantes et/ou douloureuses qui provoquent la fuite ou la lutte activent les centres de la punition ou PVS. Le PVS est formé de plusieurs centres[2]. L’activation du PVS provoque l’activation du système nerveux sympathique et la libération dans l’organisme d’ACTH et d’adrénaline qui préparent rapidement le corps aux efforts exigés par la fuite ou la lutte
Le système de punition inhibe le système de récompense. Ce qui explique que certains régimes politiques ont réussi au court de l’Histoire à manipuler le peuple par la peur et la peur de la punition (ex. : déportations). Ceci est également valable dans toute autre structure sociale : couple, famille, entreprise, etc.
Le MFB et le PVS forment les deux principaux systèmes de motivation de l’être humain. Ils ont pour but assouvir les trois pulsions instinctives (respirer, se nourrir, se reproduire) et d’éviter la douleur.



Centres d’inhibition


Le Pr. Henri Laborit a mis en évidence un troisième circuit : le système d’inhibition de l’action (Behavioral Inhibitory System (BIS)). Il est associé au système septo-hippocampal, à l’amygdale et aux noyaux de la base. Ce système est comme nous l’avons vu, celui qui prend le relais lorsque la lutte ou la fuite ne sont plus possible, avec les conséquences négatives au niveau physiologique.
Pour prendre un exemple simple, le SIA est le système qui produit l’immobilisme du campagnol survolé, à terrain découvert, par une buse. Ce fonctionnement temporaire lui sauve la vie plus sûrement que la fuite. Par contre, dans le cas où un individu se sent comme le campagnol lorsqu’il est en relation avec son patron, se parents ou autres, la situation se gâte. Car il perçoit une impossibilité de fuir ou de lutter : s’il le faisait, il en perdrait son emploi, sa place dans la famille, etc. De plus si la situation perdure des mois ou des années, les conséquences peuvent être catastrophiques en termes de santé (voir aussi le sous-chapitre sur le stress) en affaiblissant fortement les capacités du système immunitaire.
Le SIA peut également « s’enclencher » dans le cas où l’individu manque d’information à propos de ce qu’il vit dans le présent : une personne âgée devant un pc dont elle ne comprend pas le fonctionnement ou un voyage dans un pays étranger sans comprendre la langue et l’écriture. En effet, pour agir efficacement, l’être humain a besoin d'un certain nombre d'informations sur le monde qui lui donnent des possibilités différentes de répondre. Si les apprentissages et expériences antérieures n’apportent pas l’information à l’individu, le SIA prend le dessus sur le SAA. Attention : à l’inverse l’excès d’information (téléjournal, publicités agressives, etc.) a le même effet. Enfin, l’imaginaire peut produire des scénarios que l’individu redoute de vivre. Dans ce cas lorsque le cauchemar se matérialise sous les yeux de la personne, celle-ci se trouve totalement inhibée.



Le stress et le syndrome de désadaptation


Même si nous vivons au 21ème siècle, une ère hautement technologique, l’être humain reste, dans son fonctionnement, un primate. Confronté à une situation de conflit (effective objectivement ou qu’il perçoit comme tel), tout son organisme (surtout le système neuroendocrinien, système cardio-vasculaire et cerveau primitif ou reptilien, siège des instincts) se prépare à l’action avec deux types de « programmes »
  1. Le combat
ou
  1. La fuite
Hélas, le problème est que ces deux alternatives sont souvent impossibles à mettre en place pour l’homme moderne. Se trouvant alors dans l’impossibilité d’agir, il doit alors s’adapter à cette situation. C’est ici qu’apparait le stress biologique par inhibition de l’action largement évoqué par Pr. Henri Laborit.

Pour conserver son équilibre psycho-affectif intérieur face à ce stress exogène, il va devoir puiser dans ses ressources intérieures. A savoir sa personnalité qu’il a forgée au fil de ses expériences sur la base de son hérédité, puis conditionnera sa capacité à gérer le conflit et ses conséquences.
Rappelons que la personnalité de l’être humain se construit et se réorganise en permanence en fonction de l’éducation dispensé par le milieu familial, son vécu antérieur et son environnement présent affectif et matériel. La capacité d’adaptation de chacun a donc des limites liées aux « caractéristiques » de sa personnalité et à son environnement.
Une fois cette capacité dépassée (anxiété inhibitrice) ou épuisée (asthénie, dépression), apparait ce que nous appelons le syndrome de désadaptation avec les conséquences suivantes :
l  Anxiété
l  Insomnie
l  Dépression
l  Troubles compulsifs alimentaires (TOC), anorexie-boulimie
l  Et, on l’oublie, avec comme conséquence indirecte, la toxicomanie (médicaments, alcool, drogues dures) compensatrice


Conclusion de la deuxième partie


Nous avons découvert d’une manière simplifié le fonctionnement du cerveau humain face au danger. Comprendre le SSPT revient à admettre le besoin que l’être humain a d’exister en manifestant son être au travers d’actions qu’il choisit de faire en réponse aux stimuli du monde extérieur.
Au moment où le choix de ses actes n’est plus de son ressort mais qu’un événement traumatisant lui fait perdre les commandes de son corps, l’être humain vit un choc émotionnel violent.
Ce corps qu’il contrôlait a été envahi par une sensation tellement étrangère à ce qu’il s’attendait, qu’il n’a tout simplement pas réagit du tout ! Explicable d’un point de vue neuropsychologique, cet état est insupportable d’un point de vue affectif. Le corps devient comme un temple profané. Ce qui était sacré, l’intimité est bafouée, foulée au pied de la pire façon.
Pourtant, la première étape du soin pour la personne sera d’évoquer le trauma en acceptant ce qu’a été le choc au plus haut point et qu’elle l’a refoulé au plus profond d’elle.

Dans la troisième partie nous évoquerons en détail chaque étape du processus thérapeutique possible pour une personne souffrant de SSPT.




                                                                                     Jean-Christian Balmat

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[1] Les centres composant le MFB sont : l’aire tegmentale ventrale (ATV), le noyau accumbens, comme le septum, l’amygdale, le cortex préfrontal ainsi que certaines régions du thalamus
[2] Dont l’hypothalamus, le thalamus et la substance grise centrale ainsi que l’amygdale et l’hippocampe

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